dimanche 30 septembre 2012

43 - L'INTELLIGENCE PERNICIEUSE

Ou

PLUS JE CONNAIS LES HOMMES, PLUS J'AIME MON CHIEN[1] !



Par Clark G. KHADIGE, dba, desg – (JCB 1934-2012)


ABSTRAITS

Un des sujets qui apparaissent dans les médias, par périodes, est la souffrance au travail et ses conséquences malheureuses. Malgré la sonnette d'alarme agitée par les psychologues, psychiatres, médecins du travail et diverses associations de protection de l'individu, l'Etat a trop souvent du retard à réagir.

L'objectif de cet article est de mettre en évidence ce qui entraîne des individus à renoncer à leur vie, à leur personnalité et à leur identité, car soumis à des conditions inhumaines de vie au travail. Les entreprises mentionnées dans cet article ne sont citées qu'à titre indicatif, puisqu'elles ont parfois fait les titres de la première page des quotidiens et foule d'articles dans les revues. Elles ne représentent que bien d'autres entreprises dont on n'a jamais entendu parler de ce qu'elles font ou disent.

MOTS-CLÉS

Harcèlement – stress - décision – politique – procédures – intelligence – relations humaines - conséquences.
ABSTRACTS 

One of the topics that appear in the medias, by periods, is the suffering of people at work and its unhappy consequences. In spite of the alarm agitated by psychologists, psychiatrists, physicians of work and various protective associations of the individual, governments are sometimes late to react.  

The objective of this article is to put in evidence what drags some individuals to give up their life, their personality and their identity, because submitted to inhuman conditions of life at work. The organizations mentioned in this article are only mentioned for information only, since they sometimes made the titles of the first page of the dailies and crowd of articles in magazines.  They only represent a lot of others, one never heard or talked about.

KEYWORDS 

Harassment - stress - decision - policies - procedures - intelligence - human relations - consequences. 
Parmi les nouvelles diffusées par les chaînes françaises de télévision, au début du mois de juillet 2012, on a pu suivre un événement qui paraîtrait commun et habituel, sinon médiatiquement normal, qui est la mise en accusation de M. X, ex-président de la société Y pour harcèlement moral. Ce qui a attiré l'attention du gouvernement français, ce n'est pas le fait du harcèlement en lui-même mais la conséquence malheureuse ayant mené un certain nombre d'employés au suicide, dont certains sur leur propre lieu de travail. D'autres caractéristiques des tensions au travail peuvent aussi être mentionnées comme les dépressions nerveuses, les taux d'absentéismes croissant, les retards volontaires, les congés-maladie plus fréquents, etc.
Reproduisons ce que nous avons lu sur la mise en accusation de M. X et paru dans les pages du journal LE MONDE[2] :
« Dans le détail, le groupe a été mis en examen pour "harcèlement moral" et "entrave au fonctionnement du comité d'entreprise et du comité d'hygiène et de sécurité" – des organes paritaires direction-syndicats – et placé sous contrôle judiciaire avec un cautionnement de 150 000 euros, a-t'on précisé de source judiciaire. Engagée dans des restructurations, l'entreprise avait supprimé 22 000 postes entre 2006 et 2008 et procédé à 10 000 changements de métier ».
Et
« Le rapport de l'inspection du travail mettait en exergue le harcèlement managérial dont étaient victimes les salariés qui avaient commencé leur carrière au moment où la société Y était une entreprise publique non soumise à la concurrence, et qui étaient incités à changer de métier ou à quitter l'entreprise. Le groupe a "mis en œuvre des méthodes de gestion du personnel qui ont eu pour effet de fragiliser psychologiquement les salariés et de porter atteinte à leur santé physique et mentale", selon ce rapport.
Et enfin
« La plainte d'un syndicat de salariés fin 2009 suivie d'un rapport de l'inspection du travail en 2010 avaient conduit à l'ouverture d'une information judiciaire pour harcèlement moral en avril 2010. Selon les syndicats et la direction, 35 suicides de salariés de l'entreprise se sont produits en 2008 et 2009 ».
La société Y n'est pas la seule entreprise du monde ayant connu cet événement regrettable et nous pourrions aussi en citer bien d'autres[3]. Fait banal, diront certains, puisque tout harcèlement au travail ne mène pas nécessairement à ces finalités malheureuses. Ainsi, d'après les statistiques en France, elles ne représentent que 0,00213 %, c'est-à-dire que presque 22 employés sur 100 000[4] connaissent une triste fin. Chiffre insignifiant à un niveau global mais caractéristique à un niveau individuel.
Une première série de questions se poserait à priori :
Ø  Quelles sont les causes principales menant à la déchéance humaine ?
Ø  D'où vient le stress ?
Ø  Vient-il uniquement du travail et des tâches qui sont à accomplir dans ses difficultés ?
Ø  Est-il issu de relations humaines difficiles ?
Ø  Le travail est-il stressant dans ses relations avec ses composants et ses impératifs autant que dans les relations qu'il établit ?
Ø  Etc.
Pour comprendre cet état de fait, référons-nous d'abord, à l'origine du mot. Ainsi, en lisant le rapport d'information établi pour le Sénat français sur le mal-être au travail[5], nous notons, non sans surprises, que  « l'étymologie latine du mot travail, (de tripalium, un instrument de torture) rappelle, s'il en était besoin, que le travail s'accompagne d'une certaine souffrance et de désagréments. La racine latine labor, qui a donné l'adjectif « laborieux », renvoie quant à elle à la notion de fatigue ou de peine [6] ».  On voit déjà que la signification que l'on donne aujourd'hui n'a rien à voir avec ce qui était auparavant. Le travail aujourd'hui, ne serait donc qu'une obligation accompagnée de fatigue et de souffrance.
Inévitablement, quand on se penche sur ce problème et que l'on veut en comprendre toutes les facettes, on se demande si l'on doit parler avant tout de la condition humaine des individus au travail ou des conditions inhumaines que subissent ces individus à cause des politiques et des procédures  de travail imposées.
La satisfaction retirée du travail bien fait est en recul lorsque les contraintes de délai ou les exigences de la production deviennent intenables et obligent les salariés, ou les agents publics, à se contenter d'un travail de moindre qualité[7].
Mais s'est-on penché suffisamment sur un autre thème d'importance égale : la vie au travail ? Quel sens a-t'elle quand « il n'y a pas de dignité possible, pas de vie réelle pour un homme qui travaille douze heures par jour sans savoir pourquoi il travaille[8] ».
RÉPONDRE Á UNE PREMIÈRE QUESTION
Mais, essayons de répondre à une des questions posées, au début de cet article : le travail est-il stressant ou est-il une source de stress constant ?
1 - Pour certains, la réponse est inévitablement oui ! Mais pourquoi ? 
Ø  Le plus souvent parce que le travail est difficile à accomplir : les moyens sont insuffisants, les connaissances incomplètes, l'employé n'a pas les compétences requises, etc.
Ø  Il y a aussi la contrainte du temps : faire vite, faire plus ou faire vite pour faire plus (et pas souvent pour faire mieux) dans un même intervalle de temps. Une sorte d'économie d'échelle…
Ø  On pourrait ajouter les contraintes de concurrence et de compétitivité : faire vite, faire plus et faire mieux ou perdre un marché,
Ø  Notons aussi l'influence de la globalisation : produire pour mieux desservir…
Ø  Etc.
La survie de l'entreprise sur les marchés concurrentiels à outrance peut aussi être source de stress. Une entreprise involontairement, pousse ses employés à être plus créatifs et plus producteurs d'idées et d'innovations. En résultat, l'individu prend plus de temps à rechercher des sources d'imagination puisque trop souvent l'entreprise ne lui donne pas suffisamment d'informations sur ce dont il a besoin ou sur ce qui se passe en dehors de ses limites.
Un exemple de stress marquant est le travail de télémarketing, où un employé se doit de convaincre un consommateur des bienfaits d'un produit ou d'une marque et tenter de vendre par téléphone. Répéter des dizaines de fois la même chose, écouter constamment les mêmes arguments et répondre aux mêmes questions est chose assez routinière mais stressante à la longue. D'autant plus que certains consommateurs répondant à ces appels, ne sont pas particulièrement caractérisés par une politesse et une amabilité exemplaires…. Dans quelle situation morale se trouve-t-il en fin de journée ?
Cependant, aussi difficile qu'un travail puisse être, il finit bien un jour ou l'autre, puisqu'un travail est à la base un ensemble d'activités faites dans un objectif bien défini en volume et en temps. Une activité a donc une fin et l'individu passe à une seconde de même type ou non. Le stress associé disparaitrait donc sauf, bien entendu, dans le cas de répétitivité d'une même chose. Le stress serait alors, et dans un certain sens, cumulable.
2 – Pour d'autres la réponse est non. Là, aussi, essayons de savoir pourquoi : 
Ø  Les moyens techniques sont là. L'employé a plus un rôle de superviseur grâce à la technologie qu'il emploie et a donc moins de travail mental ou manuel à accomplir,
Ø  Le travail est calculé suivant les possibilités productives de chaque individu.
Ø  Des temps de pause sont insérés afin de permettre aux employés de décompresser…
Ø  Les procédures managériales sont établies suivant un système et un rythme confortables de production per capita,
Ø  Les relations professionnelles sont telles qu'un individu se sent accompagné par ses collègues,
Ø  Le travail est rendu intéressant par les séminaires ou les informations diffusées,
Ø  Etc.
Si la relation avec l'activité d'un travail peut être sans stress, il n'en est pas de même avec celle des autres individus : un prochain travail a toutes les chances de se faire avec la même équipe et sous la supervision d'un même individu. Si la relation humaine a été stressante auparavant, elle le restera dans la nouvelle activité. L'émotion, la rancœur, la déception seraient source d'une démotivation grandissante. Ici aussi, le stress est cumulable.
Ceci nous a poussés à dire, dans un de nos articles publiés[9], que le stress est principalement issu de la relation avec les autres.
UNE PREMIÈRE RÉFLEXION
Le monde vit aujourd'hui, des moments difficiles. La crise économique qui sévit depuis quelques années rend la vie des individus plus malaisée  et celle des entreprises plus critique. Si la globalisation a apporté aux consommateurs de la planète beaucoup d'avantages aux niveaux produits, marques, satisfaction, etc. et si elle en a apporté aussi autant pour les entreprises, (avec aussi beaucoup de nouveaux problèmes), il n'en est pas de même pour l'employé simple qui chaque jour se retrouve derrière son établi, derrière sa machine ou derrière son bureau.
Pour lui globalisation signifie principalement augmentation de sa production personnelle par jour. Sous le justificatif de produire plus et vendre mieux pour survivre les entreprises ont tendance à pousser volontairement l'individu à dépasser ses limites. Inévitablement le productivisme apparaît et l'hyperproductivisme tend à se faire une place naturelle : seul les forts survivent !
Mais l'hyperproductivisme n'est pas nécessairement la solution à la course effrénée des entreprises à la survie. Les conséquences humaines en sont terribles : la production personnelle chute car le mental ne suit plus et le physique ne résiste plus, et la productivité individuelle disparaît.  Comprenons ici, dans la dimension de cette idée, par le terme productivité individuelle  la quantité de travail faite par l'apport créatif de chacun. Elle est également diminuée lorsque les travailleurs sont amenés à accomplir des actes qu'ils désapprouvent, ce qui arrive, comme l'a rappelé le chercheur Michel GOLLAC, à un tiers des actifs, au moins de manière occasionnelle[10].
Le stress est l'ennemi de la créativité et de la productivité stimulatrice !
Mais l'individu au travail doit aussi subir les effets de décisions managériales dont il n'est pas responsable, principalement la réduction des coûts dont l'objectif est soit d'assurer une survie à l'entreprise en difficultés, soit tout simplement d'augmenter les bénéfices. Cette réduction de coûts passe inévitablement par une réduction des effectifs humains, en commençant par une annulation des budgets de communication (dont celle des formations et des trainings). En conséquence directe, l'entreprise se veut humaine et propose l'alternative du départ volontaire. De quoi s'acheter une bonne conscience… Face à une réponse très faible, l'entreprise se doit donc de prendre des décisions issues d'un dilemme : réduire, accepter de gagner moins ou fermer. Mais réduire entraîne à choisir entre deux options :
Ø  La décision éthique : réduire en accordant suffisamment d'avantages financiers afin que le partant puisse survivre jusqu'à obtention d'un nouveau poste,
Ø  La décision immorale : créer une atmosphère de tension constante afin de forcer les départs. La guerre est ouverte et face au nettoyage décidé la hiérarchie inférieure nettoie par peur d'être nettoyée. D'où harcèlement moral et physique constant. On parlerait facilement de l'inhumanité des hommes. Reconnaissons que le harcèlement est un frein au travail et à la vie. Un individu sous stress et sous harcèlement moral constant, perdrait plus de 70% de sa productivité et de sa créativité. L'entreprise recule. Face à ce phénomène, nous assistons à un esclavagisme moderne.
HARCÈLEMENT ET SITUATION DE STRESS
Devrions-nous ici parler de harcèlement ou, de méchanceté voulue ? Dans la psychologie comportementale, et surtout dans beaucoup de textes d'auteurs grecs, (Aristote de Stagyre, Platon, Pline, etc.), on découvre que l'homme a toujours eu tendance à vouloir dominer les autres. On remarque, alors, que certains réussissent parce qu'ils sont plus violents que d'autres, d'autres réussissent car ils ont un certain charisme qui inspire, d'autres qui réussissent car ils font peu cas de scrupules et d'autres, enfin, parce qu'ils ont le pouvoir de l'argent.
Mais la psychologie comportementale nous apprend aussi que beaucoup d'individus, la majorité si l'on puisse dire, se soumettent pour différentes raisons, dont la principale qui pourrait être le besoin de revenus financiers pour vivre. Il est un fait notoire que tout le monde ne peut pas être patron et qu'il faut bien accepter des charges de travail pour faire face aux impératifs économiques personnels. D'autres sont affublés soit d'un manque de caractère ou d'identité critique, soit un manque de confiance en soi, etc. mais surtout par peur de fuir des responsabilités morales.
L'individu a besoin qu'on lui dise quoi faire ! D'où le fait que certains, plus pernicieux, en profitent. Sont-ils poussés par la peur ? Oui, le harceleur est aussi, quelque part, le harcelé. Citons à ce propos ce que nous lisons dans le site internet HMS, (Harcèlement Moral Stop)[11] : « Bernard G. (ancien collaborateur chez W), affirme avoir été l'un des nettoyeurs : "J'ai harcelé au quotidien cinq de mes collaborateurs pour les faire partir. Je ne faisais pas cela par plaisir. C'était une machine infernale. Puis je suis devenu à mon tour l'homme à abattre : j'ai été licencié".
Mais la société Y, n'est pas la seule entreprise concernée par le phénomène du harcèlement voulu, pour des raisons que seule l'entreprise connaît. Prenons le cas de la compagnie W, issue de la fusion de W et de M, qui à travers un début encourageant socialement a laissé apparaître son vrai visage en politique de départ des employés. Il serait donc bon de lire l'article paru dans Libération, avec pour titre Comment W met ses agents sous pression[12] et dans lequel nous retenons certains points :
« Le président de W explique que sa conception de l'entreprise n'est pas celle d'une «machine à broyer les hommes». Dans la réalité, cette compagnie d'assurances mène en France une politique sociale extrêmement dure envers ce qu'elle nomme ses «collaborateurs». Harcèlements, mises en concurrence interne, discriminations, licenciements pour fautes graves imaginaires, confirmés par de nombreuses décisions de justice. De très nombreux témoignages décrivent une entreprise qui n'hésite pas à faire craquer les plus faibles et ceux qui refusent de courber l'échine ».
Plus loin, dans le même article
« Après avoir racheté son rival, W annonce qu'elle ne procédera à aucun «licenciement collectif»… l'Avif évalue à un millier le nombre de procédures engagées aux prud'hommes et devant les cours d'appel par ces ex-salariés. Elle dispose pour sa part de plus de 300 jugements rendus, dont la majorité a été défavorable à W. Sa conclusion est sans appel : «W a mis en place un plan social déguisé», explique un dirigeant de l'Avif…. »
« La stratégie de W était très organisée. En 1998, elle a donné le choix aux agents salariés de l'ex-M de signer un nouveau contrat, sans dire qu'il entraînerait une baisse de salaire. En même temps, elle a mis la pression sur les directions régionales pour qu'elles fassent signer le plus de monde possible. Pas de pitié pour ceux qui ne signaient pas. «Une politique sanctionnant implacablement les non-optants a été mise en place», détaille un avocat de l'Avif…. »
Et encore
« Mais quand cela ne suffisait pas, W n'a pas hésité à s'acharner sur certains. A plusieurs reprises, des dossiers ont été montés de toutes pièces pour justifier des licenciements pour faute grave. Dans la ville de B, on a ainsi fait signer des lettres de réclamations à certains clients en leur disant qu'ils ont été floués par leur agent ».
Sans vouloir porter ombrage aux sociétés que nous citons[13], (l'auteur ayant sélectionné des points de presse afin de mettre en relief l'objectif de cet article), pourrions-nous introduire la notion de management par discrimination dont l'objectif ne serait que celui du profit extrême aux dépends de l'être humain réduit au seul rôle d'esclave ?
LA RESPONSABILITÉ
A qui la faute : à celui qui agit ou à celui qui se soumet ? Combien de fois s'est-on aussi posé la question que « devant tant de stress dans les relations humaines sociales ou professionnelles, que se passerait-il si tout le monde en même temps disait non » ? Le patron d'une entreprise mettrait-il tout le monde à la porte pour mutinerie ?  
Mis à part les paresseux professionnels qui vivent sur le compte des autres, beaucoup sont amenés à agir souvent contrairement à leur fond d'humanisme et sont poussés à vivre constamment dans des conflits intrapersonnels de tout genre. Pourquoi ? Est-ce parce qu'à cause de notre égoïsme ridicule, nous devenons aveugle au malheur ou à la condition humaine ou inhumaine des autres ? En fait, nous avons tous peur !
Ø  Peur de perdre d'abord ce revenu qui est si important pour vivre.
Ø  Peur aussi de perdre son poste, son emploi, car en période crise, trouver quelque chose dans une autre entreprise est difficile, parfois impossible.
Ø  Peur enfin de perdre son statut social et ce qui en découle.
Ø  Peur du mépris des autres.
Ø  Peur de la pitié des autres.
On en est presque au bord d'accepter de se délocaliser mentalement et physiquement.
LA PEUR
Pourrait-on dire qu'un des facteurs, (ou le facteur principal ?) du stress, d'un côté, et du harcèlement volontaire, d'un autre, serait la peur ? Est-ce qu'insérer la peur serait une forme de gestion nouvelle, à l'instar de ce que faisaient les propriétaires d'esclaves à l'époque de l'empire romain ?
Dans une rapide définition du mot peur, Wikipédia[14] nous apprend que « la peur est une émotion ressentie généralement en présence ou dans la perspective d'un danger ou d'une menace. Elle serait de deux types :
Ø  Externe est une peur d'un danger éventuel venu de l'extérieur, dont l'individu est motivé d'éviter et adopte un comportement qui se veut préventif et auto-protecteur,
Ø  Interne, connectée à une émotion souvent négative (ex. : sous-estimation de soi) ».
« Elle dicte une certaine prudence d'action et de comportement comprenant la phobie, (qui pousse jusqu'à la paranoïa), l'inquiétude, l'anxiété, l'angoisse, la terreur ressentie, la panique et la crainte[15] ».
Elle pourrait surtout être issue de l'incertitude dans laquelle un individu évolue, soit :
Ø  Quand il se trouve dans une situation nouvelle, qui lui paraît d'abord inconnue, ensuite dangereuse dans le sens où l'expérience ne joue pas, ou plus, son rôle de mise en condition sécuritaire dans une dimension connue,
Ø  Soit quand il apprend qu'à cause de difficultés financières, (ou d'appât de gains supplémentaires), l'entreprise veut, ou se doit de, réduire ses effectifs : comment cette réduction va-t-elle s'opérer ? qui en subira les frais et conséquences le premier ?
Ø  Soit encore quand il apprend qu'il sera délocalisé et envoyé dans une autre région, dans un autre pays, ou tout simplement reconverti à une autre activité que celle qu'il exerce.
L'exemple de la société C[16], en France, (et bien d'autres), met bien en évidence cette inquiétude, même cette angoisse, qui s'empare de l'être humain concerné.
Dans la relation humaine, la peur commence par un sentiment de méfiance. Cette dernière est la représentation de l'introduction d'un individu dans une dimension autre que celles connues auparavant. Tout y est remis en question : croyances, valeurs, certitudes, perception, acquis, relations d'ordres divers, etc. Elle est également considérée comme une prévoyance et une remise en cause de ce qui a déjà été obtenu. La situation peut alors évoluer vers ce qui est, ou  peut devenir, effrayant voire dangereux[17].
Mais la peur de l'inconnu, du jamais vu ou du jamais expérimenté, est souvent hypothétique : elle remet en question la capacité d'acceptation et d'adaptation à des critères, ou à des facteurs, nouveaux. Ainsi, accéder à un nouveau poste, être chargé de responsabilités nouvelles, être délocalisé, s'engager dans un nouveau type d'activités ou dans une nouvelle entreprise s'accompagne toujours d'une certaine inquiétude sur l'avenir.
Cela peut, pour certain, être considéré comme un défi à relever : je gagne, je reste… je perds….je perds tout ! Formidable jeu de poker.
La période probatoire existante dans toute activité de recrutement, est un espace de temps où le comportement de l'individu est le plus stressé. Les enjeux sont nombreux : ne pas manquer le défi, se montrer à la hauteur, savoir établir des relations humaines flexibles et avenantes, afficher un esprit de coopération et d'assistance, etc. pour ne pas perdre l'occasion et les avantages du nouveau.  En un mot, faire bonne figure.
L'intégration dans une entreprise, puis dans une équipe de travail, est aussi source d'inquiétude. Une fois de plus nous faisons face à une situation critique qui veut que si l'individu a le choix de travailler dans une entreprise qui lui paraît la plus adéquate, il n'en est pas de même avec les individus qu'il côtoiera quotidiennement et avec qui il aura des échanges sociaux, culturels et surtout professionnels.
Ce qui nous amène à percevoir un autre type de peur : celle de l'autre. Sera-t'on accepté ou rejeté ? On en arrive à considérer que la relation humaine au travail est entachée de la peur de l'autre et de la peur des autres.
La peur de l'autre
En nous référant au dicton français « l'homme est un loup pour l'homme » on pourrait affirmer d'emblée que l'autre est, ou représente, un danger certain et potentiel. Et tout chez l'autre, est sujet à crainte, angoisse, inquiétude, peur… mais aussi attirance, séduction, enrichissement, etc. :
Ø  La position hiérarchique ou la décision du pouce : levé est signe de vie, baissé signe de mort. Le patron a toujours raison, dans les erreurs qu'il commet, à la différence près que l'erreur lui est permise. Il saura toujours en rejeter la faute sur quelqu'un, sur un fait ou sur un événement. Il n'est jamais responsable…
Ø  La compétence : D'une part on représente inévitablement un danger pour l'autre à cause de compétences affirmées, c'est-à-dire à cause d'un savoir-faire, d'un savoir-comment-faire, d'un savoir-faire-faire et surtout d'un savoir-être. D'une autre part, on est en danger face aux connaissances et à l'expérience de l'autre, mais aussi face à sa faiblesse en capacité d'assimilation, en capacité d'accomplissement d'un volume de travail dans un espace de temps plus court, en capacité de manipuler et d'interpréter l'information des faits, etc.
Ø  L'intelligence de l'autre reste aussi une source de forte inquiétude : doit-on paraître plus intelligent ou moins intelligent que l'autre ? Les conséquences n'en sont jamais positives ou avantageuses dans les deux cas. Mais le débat reste ouvert dans la dimension employés-employés autant que dans celle managers-employés ou employés-managers.
Ø  Etc.
Que faire donc quand l'autre est ou devient menace ou danger[18] ? La réponse est simple et immédiate : attaquer non pas pour se protéger ou pour détruire, mais pour ne pas être attaqué et pour survivre ! Mais on attaquera aussi sans savoir si le danger existe : pourquoi prendre le risque ? Ne dit-on pas que la meilleure politique défensive est celle de l'offensive elle-même ? On entre ainsi dans la dimension de l'attaque de l'autre, justifiable ou non. Mais tout est justifiable, car sa seule raison reste la peur.
La question relative à la peur des autres traite surtout d'agoraphobie (la peur des foules). Travailler avec les autres, reste souvent une action pénible quand l'équipe, le groupe ou la foule apparaissent comme une dimension de danger, ou d'espace inconfortable. Ajoutons que quand les compétences et les perceptions professionnelles ne s'accordent pas, la situation n'en est que plus stressante. Ceci, souvent, est mis en relief lors de l'évaluation des compétences et des réussites conduite chaque année dans les entreprises sur l'ensemble du personnel. Cette évaluation est parfois ressentie comme un jugement et les résultats sont appréhendés comme  une sentence. L'angoisse présente dure et bloque.
Certains individus recherchent donc un travail les isolant des groupes, soit pour mieux faire, soit pour ne pas perdre du temps en polémiques inutiles, soit enfin parce qu'ils ont une certaine inquiétude concernant le jugement qui pourrait leur être porté ou simplement parce qu'ils considèrent qu'ils réussissent mieux seuls. Généralement, le compliment et la reconnaissance du travail bien fait par les membres d'une même équipe ne court pas les rues…
La rivalité, la jalousie, l'ignorance et l'incompétence qui découlent de ces situations, représentent autant d'obstacles que de freins à la productivité créatrice de chacun.
ATTAQUER POUR SURVIVRE
Qu'est-ce qui pousse l'individu à faire souffrir les autres ? Quel plaisir en tire-t-il ?
Corollairement, pourquoi se laisse-t'on faire ? Parmi les réponses que cet article proposera, lisons ce que Christophe DEJOUX[19], spécialiste français de la question de la souffrance au travail, en dit : « La question centrale est: pourquoi les salariés acceptent-ils de faire tout cela, y compris des actes qu'ils réprouvent? Pour leur entreprise. La direction invoque la guerre économique. Les gens vont donc se mettre à travailler comme des brutes pour l'entreprise qui, à la fois, leur fait des promesses et en même temps les menacent. Petit à petit, ils sont amenés à concéder des choses qui les touchent dans leur identité, qui leur font honteLes gens en arrivent à trahir les règles du métier, leur éthique professionnelle, au nom des objectifs. Or, faire toute la journée des choses qu'on réprouve moralement finit par atteindre l'image de soi. C'est un peu comme se trahir soi-même ».
La gestion par la peur augmente t'elle les profits d'une entreprise ?
Ce qui est trop souvent demandé aux employés dans une entreprise est l'implication totale, l'engagement et l'investissement personnel, l'action et la réaction plus passive qu'active afin de répondre aux exigences imposées par le concept de survie de l'entreprise. Rien, cependant, ne leur est proposé en contrepartie, à l'exception du « estimez-vous heureux d'avoir du travail… ». Comme cité au début de cet article faire plus, sans nécessairement faire mieux, afin de détourner l'attention… Christophe DEJOUX le cite dans une interview sur le sujet et dit « … pour obtenir la quantité, les salariés sont souvent obligés de brader la qualité du travail »[20].
Ainsi, la concurrence inter-individus en capacité de production, (et non en créativité ou en productivité), est favorisée car l'important reste, et restera toujours, l'intérêt final de l'entreprise et le profit des actionnaires. Elle fait apparaître et peser sur les épaules et le moral des employés une plus lourde responsabilité : celle de devoir prendre des décisions à mesure qu'ils accomplissent leurs tâches. Ce qui est une source de réprimandes dont certains dictateurs de travail sont friands.
En conséquence, la situation sociale rencontrée est celle du passage désastreux de la communauté partageante de la responsabilité du travail au collectif du travail et, finalement, à une situation d'employés connectés dans leurs relations de travail, mais isolés socialement.
Or l'individu isolé peut-il maintenir sa productivité sans avoir de relations avec les autres ? A cela s'ajoute le sentiment d'impossibilité de compter sur la solidarité des collègues, et le fait de faire face à la conduite déloyale observée entre collègues. Chacun pour soi… quitte à verser des larmes de crocodile par la suite.
Quand on revient à l'idée du harcèlement social et/ou professionnel auquel est soumis l'individu et que l'on prend conscience de conséquences regrettables (après coups), ne pense-t'on pas que la société en est quelque part responsable? 
DE LA MÉCHANCETÉ DE L'HOMME
Quand on regarde ce qui se passe autour de soi dans le monde des entreprises, on ne peut s'empêcher de penser jusqu'où ira la méchanceté et la cupidité de l'homme ?  « Comment des salariés peuvent-ils en arriver à commettre l'irréparable ? Pourquoi le travail, qui devrait être synonyme d'épanouissement, devient-il, dans certains cas, une source de souffrance[21] »?
Beaucoup de questions, il est vrai, apparaissent quand on se penche sur le problème du mal-être et du malaise ressenti dans des situations déterminées.
Mais essayons de répondre partiellement à ces questions posées dans le paragraphe précédent :
1 – Jusqu'où ira la méchanceté de l'homme ?
Le mot méchanceté vient du terme mal dans un sens psychologique et non dans celui physique[22]. De ce point de départ, nous pourrions considérer trois dimensions différentes : vouloir du mal, faire du mal et vouloir faire du mal.  
Que ce soit l'un ou l'autre de ces termes, ils signifient surtout porter atteinte négativement à la dimension d'un être humain. Cette atteinte peut être volontaire ou commandée. Voyons, dans ces deux cas, ce que cela pourrait impliquer :
Ø  La méchanceté volontaire est un comportement choisi et voulu contre une tierce personne et serait issu d'un sentiment, ou d'une sensation, d'infériorité, (souvent dénommé complexe d'infériorité), ou du pressentiment d'un danger potentiel. Ce qui entraîne la décision d'agir avant plutôt que de subir l'après. L'auto-défense soulignerait l'importance de l'acte avant celui de la négociation ou de la réflexion. Frappe, et discute ensuite !
Effectivement, devant de meilleures capacités, de nouvelles compétences, ou d'un savoir-être plus relationnel, il est difficile, pour beaucoup, d'accepter de se voir relégué au second rang, quitte à se voir déclassé, remplacé, vite oublié et, pour comble, critiqué. Dans cette dimension, l'angoisse, la jalousie, l'envie, la haine, etc. seraient des commanditaires de méchanceté.
Ø  La méchanceté commandée serait un acte demandé expressément, ou insinué, afin de décourager et de forcer soit une action conflictuelle, soit un départ grandement souhaité, soit toute autre raison pour se débarrasser de ce qui gêne ou de ce dont on n'a plus besoin. Cet acte est souvent ressenti comme :
-         Un soulagement quand une certaine partialité existe entre un acteur de méchanceté commandée et ses sentiments négatifs personnels,
-         Une obligation pour ne pas la subir soi-même pour refus d'obtention,
-         Un sentiment de malaise quand rien de personnel ne dicte un tel comportement, ou quand une certaine estime existe,
-         Un conflit intrapersonnel quand on juge la décision inadéquate ou appliquée à ceux qui ne la mérite pas. Dans cet ordre de choses, n'oublions pas que le meilleur, et le pire notons-le, juge d'un travail bien fait est surtout celui porté par les pairs.
-         Un sentiment de perversité profonde : certains prennent du plaisir dans la souffrance des autres,
-         Une situation mentale de sadomasochisme primaire existante dans l'esprit de personnes nerveusement fatiguées.
Il faudrait, aussi quelque part, mentionner le fait de ces manipulateurs d'informations. Ces individus qui, dans une certaine mesure, savent interpréter de différentes manières ce qu'on leur dit. Savoir passer entre les mailles est, très souvent, un avantage et une politique comportementale pour eux car ils évitent les pièges en rejetant sur d'autres, sans les mentionner, ce qui a été fait et ce qui aurait dû être fait.
C'était le rôle des bouffons, à l'époque des rois, qui, à travers une interprétation ironique d'un fait, faisaient rire les monarques. Du bouffon, ils passèrent au niveau des flatteurs tablant sur un fait certain que tout individu aime être flatté, puis des courtisans. L'objectif était principalement de détourner les yeux  des supérieurs sur ce qu'ils étaient ou sur ce qu'ils faisaient en les orientant vers le comportement des autres, et principalement sur ceux qu'ils n'appréciaient pas particulièrement, ou contre ceux qu'ils considéraient comme étant des ennemis ou des obstacles à leurs intérêts personnels. Du Machiavélisme à l'état pur !
Dans cet ordre de choses, notons que ces flatteurs, courtisans ou quel que soit le qualificatif qu'on leur donne, ont toujours un lourd fardeau à porter : celui de l'innocence du patron. Il faut bien qu'ils justifient leur comportement de tricheurs aux yeux de leurs pairs. De là, à désigner le bouc émissaire… le pas est facile à franchir !
En quelque sorte vivre et revivre la célèbre fable de Jean de la Fontaine Le Corbeau et le Renard !
2 – Jusqu'où ira la cupidité de l'homme ?
Quand on parle de cupidité, on associe souvent à ce terme l'accaparement d'intérêts financiers. Il vendrait sa mère pour de l'argent est une expression courante du jugement porté sur des individus dont l'appât de l'argent, et de ce que ce dernier apporte, est une priorité certaine.
Mais la cupidité pourrait aussi se traduire par ce besoin, souvent incontrôlable, de vouloir commander et de vouloir imposer quelles qu'en soient les conséquences.
L'expression, souvent répugnante, définissant un comportement cupide extrême n'est-elle pas « … passer sur le cadavre des autres… » ? L'intention est-elle mauvaise ? Dans le cas de faire partir les autres, on pourrait l'affirmer. « La méchanceté est donc bien guidée par un mauvais vouloir, une volonté mauvaise[23]… » et nous pourrions ajouter « le plaisir sadique de faire du mal… ».
Ainsi, être méchant ne signifie pas seulement le fait de le faire, ou de le faire en fonction d'objectifs aveugles pour l'individu, mais clairs pour celui qui le fait ou le commandite. Cela signifie aussi d'y penser. Mais on y pense dans la dimension de la relation avec les autres. Si elle n'existe pas, il ne peut y avoir de méchanceté. Anéantir semble être le mot-clé de cette relation négative et la méchanceté est toujours liée à un comportement volontaire du faire-souffrir et, peut-être, de l'aimer faire souffrir.
La méchanceté est toujours identifiée après qu'un acte ait été commis alors que l'être méchant peut être reconnu au préalable par son comportement vis-à-vis des autres, ou vis-à-vis d'un individu ciblé. On pourrait affirmer à la limite, qu'elle peut être prévisible. Car elle est trop souvent accompagnée de mensonges et d'hypocrisie…
3 - Comment des salariés peuvent-ils en arriver à commettre l'irréparable?
Ce qui tue surtout, c'est de ne pas savoir pourquoi l'attitude des autres est si négative, voire si néfaste. « Qu'est-ce j'ai fait pour qu'on me traite ainsi ? Ne suis-je pas aussi un être humain ? Ne fais-je pas mon travail correctement ? »  etc.
Sous l'effet de tensions relationnelles, autant verticales qu'horizontales, sous celui de pressions de plus en plus fortes, sous celui encore de réprimandes, d'actes de colère voulue, de rabaissement humiliant, de critiques acerbes, d'excuses ou de raisons injustifiables, on fait souffrir les autres. Parce qu'on le veut ! Parce que seul le plus fort reste ! Parce qu'on ne veut pas subir les autres…parce qu'on ne veut pas finir à leur place, ni finir comme les autres. Mais aussi parce qu'on se sent supérieur à l'autre !
Comme nous l'avons souligné au début de cet article, le stress issu de harcèlement divers, de difficultés de compréhension et d'adaptation, de facteurs internes autant qu'externes est cause d'une déchéance vertigineuse de l'être humain, dans les conditions actuelles de crise mondiale et de globalisation extrême. La maladie de la survie ramène l'individu à un comportement autant soit peu instinctif.
Ainsi, les faibles, plus susceptibles de subir les attaques des autres, se voient parfois agir sans réellement en prendre conscience : dépressions de tous genres, abandon de soi, perte de personnalité et d'identité, etc. amenant l'individu à remettre en question sa raison de vivre.  Quand il n'y en a plus, (de raisons de vivre), pourquoi continuer ?
LES TECHNIQUES DE MANAGEMENT SONT-ELLES AUSSI RESPONSABLES ?
(Dans le cadre de cet article, nous ne parlerons pas de techniques managériales au service d'intérêts économiques, mais nous essayerons d'identifier ce qui est utilisé pour arriver à des fins moins recommandables).
Ainsi, il est courant, (et plus facile) de faire porter le chapeau aux autres de tout ce qui ne va pas : une mauvaise prise de décision, un faux pas avec un client, une perte financière d'importance… la souffrance des autres…. Etc. La fameuse politique du « ce n'est pas moi, c'est lui » ou politique du parapluie.
L'Intelligence Managériale, que nous avions définie comme la « capacité de concevoir et de coordonner les activités d'une entreprise en fonction d'objectifs, de fonctions diverses et de disponibilité de ressources dans une entreprise[24] », entre, ici, en jeu. Cette intelligence sert des intérêts divers autant positifs que négatifs.
On a tendance à croire que l'utilisation de formes d'intelligences en gestion des entreprises a un objectif d'assurer une réussite certaine à travers une éthique comportementale à toute épreuve. Or, l'Intelligence n'est pas seulement éthique, elle a aussi son côté  immoral et amoral. Tout dépend, bien sûr, des objectifs définis.
Dans le souci de soutenir le sujet de cet article, notons que l'Intelligence Managériale peut ne rien avoir d'éthique, mais peut favoriser la recherche d'une solution à moindre frais, plutôt que celle qui conservera, auprès des individus internes ou externes à l'entreprise, une image de marque solide. N'oublions pas que l'être humain oublie vite, tant qu'il n'est pas concerné par un malheur quelconque. L'image de marque ternie se reparera d'une image nouvelle et tout rentrera dans l'ordre. Et puis le malheur des autres… peu s'en soucient.
Comme exemple pointu, prenons celle des entreprises qui ont appliqué une politique immorale et amorale pour licencier abusivement un certain nombre de leur personnel : qu'ont-elles perdu en chiffre d'affaires ou en capital-clients ? En appliquant une nouvelle politique de relations-clients bénéfique, elles ont aidé, sinon favorisé, l'oubli et augmenté leurs profits.
Pour atteindre leurs buts de réduction de personnels dans une optique de réduction des coûts ou d'augmentation de bénéfices, l'Intelligence Managériale passera la main à l'Intelligence Pernicieuse[25] qui est cette « capacité de saper les valeurs et les institutions établies, basée sur des intérêts personnels, ou dictés, issue souvent soit d'un déséquilibre relationnel mental, soit d'une peur intérieure d'être écarté ou déconsidéré, etc. ».
Appliquer donc des procédures de désinformation, de mal information, de détournement ou de rétention d'informations autant que de déformations, créera une situation dans laquelle « les salariés comprendront moins bien que par le passé les objectifs de leur entreprise… la priorité donnée à des objectifs financiers à court terme… [26]». En conséquence directe, la performance sera ralentie faute de savoir comment et de savoir pourquoi.
Ajoutons, encore une fois, la politique de Ponce Pilate observée par l'éloignement des managers. Ceux-ci, bien au courant de ce qui se passe, joueront le jeu du non-savoir, de l'étonnement et trouveront suffisamment de subterfuges pour renverser la vapeur et culpabiliser l'innocent. Ils se diront surpris de constater que quelqu'un (?) ait pu  «avoir mis en place une politique délibérée visant à provoquer de la souffrance au travail pour créer des conditions de départ[27]». 
DES CONSÉQUENCES REGRETTABLES
Beaucoup d'études sur le sujet, ont fait apparaître un lien indissociable entre des politiques de contraintes en travail, associées à des comportements souvent qualifiés de méprisants, et des situations de stress chronique entraînant des états dépressifs. La dépression nerveuse peut souvent favoriser un suicide.
Un suicide peut être professionnel ou physique. Dans le premier cas, il s'agira d'un sabotage pur et simple du travail, de celui des autres et, éventuellement, du matériel disponible avec une intention délibérée de vengeance. Nous disons vengeance parce qu'à la base, un individu n'a aucune raison de déclencher un acte destructeur, ou simplement vindicatif, s'il n'y est pas astreint.
Dans le second cas, un suicide physique, c'est-à-dire la prise de décision concernant le fait de mettre fin à sa vie, est surtout une conséquence de l'abandon, ou de la perte, d'une personnalité, d'une valeur humaine, d'une désidentification de soi, ou de la réalisation qu'aucune raison de vivre ne reste.
Dans ce cas précis, la cause est principalement due à des facteurs externes, politiques, économiques ou même humains. Au travail, c'est ce dernier facteur qui prime et est conséquent à des politiques voulues de harcèlement moral et physique entraînant des situations dépressives et d'incontrôle total. La société du travail est souvent une société délibérément criminelle. Criminelle, car pousser les gens à l'extrême est un crime humain innommable.
Mais qui en portera finalement la responsabilité morale ?
Ø  Le patron, tout d'abord, puisque c'est lui qui a décidé et dressé une politique d'écartement, pour diverses raisons.
Ø  En second lieu, les sous-fifres qui, pour une raison ou une autre, ont développé un excès de zèle pour faire bon visage.
Ø  L'équipe de travail, en porte aussi une part de responsabilité. Où sont passées la solidarité et la complicité humaine face à un problème qui tôt ou tard va frapper cette équipe ?
Ø  Les employés d'autres départements qui, au lieu de porter assistance à personne en possible danger, observent en pensant que leur tour n'arrivera jamais et se cacheront derrière  des excuses et des raisons montées de toutes pièces.
Comment ces gens réagissent-ils au fond d'eux-mêmes ? Que ressentent-ils quand cet acte épouvantable du suicide se déroule devant eux ? Qui a le courage d'en désigner le responsable ? On assiste, ici, à la lâcheté humaine, managériale autant que celle des occupants des couches inférieures de la hiérarchie.
Bien sûr, rien n'est fait, ou décidé, avec des intentions mauvaises. Mais les conséquences veulent que l'aboutissement de ces procédures malheureuses soit négatif. Doit-on alors juger celui qui en a décidé ainsi, l'acte ou l'intention ?
Cela ressemble, un peu, à une émission télévisée de la chaîne satellitaire Animal Planet, autant que celles d'Animaux, ou toute autre chaîne de ce type. Dans le programme de présentation des fauves et de leur vie quotidienne, il est courant de les voir chasser. Quand ils attrapent leur proie, la caméra se tourne vers le reste du troupeau qui observe la scène de mise à mort avec un regard ahuri et bête sans savoir ce qu'ils doivent faire.
Le monde du travail est-il devenu une arène où se rencontrent des gladiateurs modernes (les employés devenus ennemis) sous le regard de César (le patron) ?
CONCLUSION
Au lu de ce qui précède, que penser de la mise en accusation de M. X ? Il s'en sortira assez facilement car ses avocats, qui seront sûrement parmi les meilleurs de France, sauront jouer la carte de la mauvaise interprétation de ses dires. C'est peut-être vrai. Reste à prouver le contraire.
Mais alors, qui serait réellement à blâmer ? Inévitablement, c'est le système, cette forme d'institution de sauvegarde des intérêts envers et contre tout…et tous !
Dans le cadre de l'Intelligence en Management, et dans ce qui nous intéresse aujourd'hui, nous pouvons remarquer l'absence du double rôle de l'Intelligence Empathique[28] :
Ø  Quand la prise de décision est éthique : il est facile de se représenter les difficultés de réinsertion professionnelle après un départ volontaire. Mais les avantages donnés, aussi profitables que possible, sont-ils réellement bien conçus ? Cependant, le droit au chômage, dans la plupart des lois européennes, s'applique-t-il dans une démission volontaire ?
Ø  Quand la prise de décision est immorale, c'est-à-dire quand on force un départ : peu se soucient de ce qui se passera après. L'important reste le départ et les avantages gagnés par une démission forcée. Mais, après l'application de décisions stressantes ou harcelantes, et que la démission est enfin signée, peu s'imaginent qu'elle sera accompagnée d'un acte malheureux concernant la vie ou la santé de l'individu concerné.
Oui, l'Intelligence Empathique ne joue plus son rôle quand il s'agit de confirmer et de protéger les intérêts des entreprises, des actionnaires et de tous ceux qui profitent, d'une manière comme d'une autre, de l'évolution financière de l'entreprise. Car, notons-le avec force, le harcèlement voulu pour cause de départ, est une technique à 360° puisque tous s'y mettent : les supérieurs, les subordonnés, les pairs et, souvent, les partenaires économiques externes.
Ces individus, peut-être caractérisés par un esprit sans scrupules, prisonniers du pouvoir de l'argent et surtout soucieux « du pouvoir qu'ils ont sur les hommes », ont-ils une âme ? Sont-ils humains ? Regrettent-ils leur acte ? Ont-ils suffisamment conscience des conséquences fâcheuses de ce qu'ils ont décidé ? Ont-ils des remords ? Peut-être pas.
Mais on leur trouvera toujours une excuse…
Oui ! Jean-Jacques ROUSSEAU avait raison : plus je connais les hommes, plus j'aime mon chien !

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANDRE C., (2004) -  Psychologie de la peur : Craintes, angoisses et phobies - Éditions Odile Jacob 
CHOMSKY N. (1999) - , Necessary Illusions: Thought Control in Democratic Societies - South End Press.
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DEJOUX C., BEGUE F., (2009) - Suicide et travail : que faire ?  PUF
FEINSTEIN JS, ADOLPHS R, DAMASIO A, TRANEL D, (2011) - The human amygdala and the induction and experience of fear - in Current Biology 21   
DERIOT G., Sénateur (2010) – Rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales par la mission d'information sur le mal-être au travail – SENAT Session extraordinaire de 2009-2010.
HIRIGOYEN M-F., (1998) – Le Harcèlement moral. La violence perverse au quotidien – Syros.
KHADIGE C., - L'enfer, c'est les autres. Le côté négatif de l'Intelligence relationnelle – cgcjmk.blogspot.com.
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ÖHMAN, A. (2000). Fear and anxiety: Evolutionary, cognitive, and clinical perspectives. In M. Lewis & J. M. Haviland-Jones (Eds.). Handbook of emotionsNew York: The Guilford Press.
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TANCER, B. (2008) - What millions of people are doing online and why it matters -  New York: Hyperion.
WEBOGRAPHIE
Approche Neurobiologique des troubles-anxieux [archive] sur www.troubles-anxieux.com.
Définition du mot Peur : État émotionnel stressant [archive] sur www.psychologies.com.
8d237810a7/a/suicides-de-salaries-le-monde-du-travail-est-aujourdhui-un-lieu-devaste-christophe-de.html
André MALRAUX – La condition humainehttp://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/266
Journal télévisé de TF1 et TF2 - juillet/août 2012
Méchanceté et perversité- - http://www.philoflo.fr/resources/La+m$C3$A9
chancet$C3$A9.pdf


[1] Jean-Jacques ROUSSEAU – Rêveries d'un promeneur solitaire.
[3] Ces entreprises sont citées dans différents articles trouvés sur le net sous la rubrique harcèlement moral ou stress. NDA.
[5] DERIOT G., Sénateur (2010) – Rapport d'information fait au nom de la commission des affaires sociales par la mission d'information sur le mal-être au travail – SENAT Session extraordinaire de 2009-2010.
[6] idem
[7] DERIOT G., opcit
[8] André MALRAUX – La condition humainehttp://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/266
[9] KHADIGE C., - L'enfer, c'est les autres. Le côté négatif de l'Intelligence relationnelle – cgcjmk.blogspot.com.
[10] idem
[13] L'auteur tient à préciser que le nom des entreprises citées sur Internet, portent délibérément une lettre W, M, B etc. dans cet article. L'objectif n'est pas de porter ombrage à ces sociétés qui, malgré des événements fâcheux, ont aussi un côté très humain, dont malheureusement la presse ne fait que peu cas. NDA.
[15] idem
[16] Tiré du journal télévisé de TF1 et TF2 - juillet/août 2012
[17] Idem.
[19] Christophe DEJOUX est l'auteur de nombreux ouvrages à ce sujet, dont « Souffrance en France : La banalisation de l'injustice sociale » et plus récemment de « Suicide et travail : que faire ? » avec Florence Bègue (2009, éd. PUF).
8d237810a7/a/suicides-de-salaries-le-monde-du-travail-est-aujourdhui-un-lieu-devaste-christophe-de.html
[21]  DERIOT G., opcit
[22] Nous nous contenterons de traiter les termes de méchanceté, de mal et de perversité dans le cadre du sujet de notre article seulement. NDA
[24] KHADIGE C., (2011) – Glossaire des qualificatifs multidimensionnels de l'Intelligencecgcjmk.blogspot.com
[25] KHADIGE C., - opcit
[26] DEJOUX C., opcit.
[27] idem
[28] Capacité à ressentir ce que ressentent les autres, à se mettre en situation différente afin de prévoir, comprendre et agir pour le mieux ou en fonction d'intérêts déterminés. (KHADIGE C., Glossaire des qualificatifs multidimensionnels de l'Intelligence – cgcjmk.blogspot.com)